Après le Social Branding : le Sustainable Branding
Il y a quelques années, je dirigeais des équipes de designer pour Apple en Californie. Notre seule obsession : le Social Branding. Imaginer des systèmes visuels uniques et puissants, capable de différencier Apple sur les divers réseaux sociaux, afin d’émerger parmi la foultitude de messages et d’offres concurrentes.
Nous passions autant de temps et d’énergie sur le fond que sur la forme. Du vrai branding au sens noble du terme, celui qui ne se limite pas juste à l’emballage (le dessin) mais qui intègre dès l’amont une réflexion stratégique pour dégager une idée force autour d’un produit ou service (le dessein).
Un exemple : la refonte de l’App Store.
D’abord une idée centrale - passer d’un magasin d’Apps à un magazine quotidien sur les Apps- puis un système graphique élaboré et propriétaire. Un double chantier donc : d’un côté changer de métier pour devenir curateur d'applications avec des critères de sélection précis, une ligne éditoriale stricte, la formation des rédacteurs… et d’un autre côté la création de codes graphiques puissants mais suffisamment flexibles pour assurer reconnaissance et émergence dans le temps, éviter la lassitude, et donner la part belle aux Apps. Le résultat visible est une toute nouvelle app qui pousse 5 applications par jour, avec un habillage fort basé sur le “chicklet”, ce carré que l’ont retrouve sur l’app et sur les réseaux sociaux, décliné à l’envi selon les catégories produits et les sujets. Le résultat moins visible, un nouveau business modèle qui donne plus de la valeur à l’App Store, déjà très gros contributeur dans les revenus du géant américain.
Aujourd’hui chez Hyssop, sur les sujets RSE, la recette n’est pas différente.
Il s’agit dans un premier temps d'accompagner les clients à avoir une vision, caler une ambition et définir une direction forte (versus un simple emballage séduisant). Cela implique de questionner le business model, d’interroger les réflexes, et de savoir changer le fond avant de vouloir travailler la forme. Bref, le story making avant le story telling.
C’est pour cela que tout chantier RSE chez nous commence par une phase d’analyse technique, un diagnostic poussé s’appuyant sur des référentiels éprouvés (ISO 26000 ou GRI) ou sur des analyses de cycle de vie quand nécessaire, pour comprendre là où résident les vrais impacts environnementaux, sociaux et sociétaux d’une marque. C’est ce travail d’analyse qui permet d’éviter le greenwashing, de déceler les opportunités business, et de définir une proposition stratégique forte. Ensuite seulement vient le temps des mots et des signes distinctifs, pour valoriser et magnifier l’idée ou le concept….
C’est tout cela que nous appelons le Sustainable Branding, une réflexion intégrée sur le fond et la forme au service de l’impact positif.
TRIBUNE - Voyage au coeur du Vivant
Cet été HYSSOP n'a pas chômé. Mais c'était tout comme tellement tout était délicieusement nourrissant et passionnant : mieux qu'un bon roman à bouquiner sur sa serviette. Notre été s'est passé autour du vivant : un bien beau sujet que l'on a tenté de vous résumer ici.
La biodiversité, le vivant, sont au cœur de l’actualité en cette rentrée. Congrès mondial de la Nature à Marseille (UICN), Agir pour le Vivant à Arles, les événements qui lui sont consacrés se multiplient. Mais comment appréhender au mieux cette question du Vivant ? Dominique Royet, cofondatrice d’Hyssop, nous partage son expérience sur la question. À lire ici ou là sur l'excellent TheGood.fr.
1ère Escale : Le monde.
Sans valise hormis sous les yeux, mon voyage commence sur mon sofa par une lecture aussi éclairante qu’un franc soleil d’été. Nous sommes en Juin, le 10. Deux instances référentes que sont l’IPBES (pour la biodiversité) et le GIEC (pour le climat) signent un rapport commun qui alerte sur la nécessité de traiter conjointement ces deux enjeux, intimement liés dans le vivant mais séparés dans la vie. Sûrement trop tard pour mettre en coloc la Cop15 sur la biodiversité (Chine) & la Cop26 sur le climat (Ecosse). Comment ici interdire la déforestation d’écosystèmes qui stockent beaucoup de carbone tout en abritant une forte biodiversité. Comment planter là-bas toutes ces monocultures d’arbres n’importe où au nom de la compensation carbone détruit finalement la biodiversité. Comment j’ai été ébouriffée par tous ces liens biodiversité & climat, et comment cette biodiversité participe à la réduction des GES.
2ème Escale : Agir pour le vivant à Arles
Une pléiade d’intellectuels, d’écrivains, de sociologues, de philosophes se sont retrouvés pour la 2e édition de ce festival arlésien afin de partager avec nous leurs avis, leurs émotions, leurs concepts, leurs visions, parfois leur spiritualité lors des tables rondes sur ce thème qui sera celui de mon été : LE VIVANT. Quelques actions très intéressantes ont émergé aux détours des discussions : Nathan Stern qui promeut l’idée d’une « Ecodétaxe » (une TVA réduite pour les produits qui ont un impact moindre), Eva Sadoun qui nous invite à une conversion de l’économie vers un partage des communs, le Revenu de Transition Environnementale versé en contrepartie d’activités orientées vers l’écologie et le lien social… Mais globalement « Agir pour le Vivant » aurait dû s’appeler « Réfléchir au Vivant » : ses contenus très riches et passionnants ont certes permis d’élever le débat et d’avoir une vision holistique du vivant. Cependant, après la diffusion (émue) d’ANIMAL, le film de Cyril Dion montré en avant première à Arles, on sort convaincu que l’action est plus que jamais déterminante et urgente. Lui-même d’ailleurs nous donne une clef en nous encourageant, chacun dans notre métier, à agir, à élargir nos ambitions au-delà de gagner un salaire nécessaire à notre vie quotidienne, à donner du sens à ce que nous faisons.
3ème Escale : Le congrès mondial pour la nature
Et justement, en parlant d’actions… Ils ont été très nombreux à se retrouver, ces acteurs, au Congrès Mondial pour la Nature de l’UICN à Marseille. Ici, le Vivant qui a accompagné mon été est devenu biodiversité. Et ici, tous se battent pour lui conserver sa place. Des centaines d’associations et d’organisations se sont retrouvées pour débattre des différentes solutions mises en œuvre sur le terrain, en tirer des enseignements, convaincre les grandes entreprises présentes de jouer leur rôle. Les grandes institutions bailleurs de fonds sont présentes et les deals internationaux se font dans les couloirs, au détour d’un dîner, en buvant un verre autant qu’autour de la table des négociations. Toutes ces personnes disséminées de par le monde, sur des terrains souvent de combat, sont heureuses de se retrouver pour partager dans cette enceinte et on les comprend… et ça fait du bien.
Cela a aussi été l’occasion aux politiques de prendre des engagements forts en matière de protection des espaces. Espérons qu’ils se transforment en loi, décret, réforme : car tous ces experts sont unanimes. Au stade où nous en sommes, seuls des espaces extrêmement protégés pourront préserver ce qui reste de biodiversité.
Ces discussions de tous ordres ont couvert le bruit des cigales : espérons qu’elles fassent encore plus grand bruit prochainement, notamment auprès des entreprises de taille moyenne : on peut trouver dommage que personne ne s’intéresse dans l’enceinte de l’UICN au formidable levier d’actions que représente cette force économique.
De la même manière, les jeunes n’étaient pas très présents dans les débats en dehors de la formidable Magali Payen qui a présenté la nouvelle campagne de “On est prêt”. Pourtant, bien conscient de l’importance de l’éducation, l’UICN avait installé de nombreux stands de sensibilisation pour les enfants où l’on pouvait voir, (ré)apprendre un peu de Nature sous différentes formes. Une impressionnante œuvre, « Immersion », de Lise Marie Koelher, nous permettait de mieux comprendre le fonctionnement d’un éco-système le tout en réalité augmentée… Fascinant, très amusant, cela m’a questionnée. Faut-il augmenter la réalité pour comprendre la Nature, le Vivant, la biodiversité ? Pourquoi ne pas les emmener dans la vraie, celle que l’on peut toucher, sentir, expérimenter…
4ème Escale (Finalement la plus belle) : Les Açores
Dans le film de Cyril Dion, l’anthropologue Philippe Descola, répond à la question « Comment renouer avec le vivant ? » par une désarçonnante évidence : « en le fréquentant !».
Car finalement, toutes ces belles personnes rencontrées pendant mon voyage en biodiversité disent la même chose : on protège mieux ce que l’on connaît mieux. Lorsqu’on est dans la nature, en contact avec la biodiversité, on sent quelque chose de fort sur lequel nous ne sommes pas obligés de mettre des mots. C’est cette émotion qui nous fait comprendre à quel point ce Vivant est indispensable non pas à notre survie mais à notre vie. A partir de là, nous ne pouvons que nous engager à le respecter voire à le protéger.
Finalement, de retour sur mon sofa parisien d’où a commencé mon voyage, je me suis dit que j’en avais plus appris sur le vivant durant ma randonnée estivale dans les Açores qu’au terme de toutes ces conférences, débats et tables rondes… Ou plus précisément que gambader dans le Vivant des Açores m’a permis d’en faire autre chose de plus riche qu’un simple sujet de débat, d’étude, scientifique, chiffré et finalement désincarné. Les 2 sont finalement nécessaires : notamment pour passer à l’action.
L’insoutenable légèreté des initiatives green
INfluencia • Le 06.03.2021
Faire ses courses dans un supermarché devient le parcours du combattant responsable par excellence, tant les messages sont partout, différents, parfois dissonants. On y trouve, en vrac mais toujours emballé : de l’éco responsable, de la beauté plus durable, de l’élevage responsable, du labellisé à qui mieux mieux, de la filière durable, de la compensation carbone, de l’engagement dans la transition écologique, du made in France, de l’emballage réduit et/ou en matière recyclé voire recyclable, du jetable éco-responsable (notons l’oxymore)…
Bref. On reprend notre respiration en même temps que nos esprits pour déplorer cette surenchère qui en met partout, et l’envie de ranger la chambre nous démange pour gagner en lisibilité.
On veut des preuves.
Bien sûr, toutes ces entreprises se déclarent engagées…. mais pour beaucoup, engagées seulement à promouvoir leurs produits, en parlant responsabilité, environnement, naturalité et autres termes qui en soit ne signifient pas grand-chose. Que serait un produit ou une marque non responsable ? Estampiller des mots green sur un packaging même allégé ne suffit pas pour la planète, et ne suffira plus pour le consommateur. Pour juger de ce qui est intéressant ou non pour la Planète (l’environnement et les hommes), il faudrait voir en quoi ces formules green qui se veulent magiques, souvent concoctées sur un coin de table marketing, reposent sur des preuves. Et si oui, en quoi les actions réalisées sont pertinentes par rapport aux enjeux de leur secteur. C’est une des conditions pour optimiser leur utilité pour la planète mais également leur crédibilité vis à vis du consommateur.
On a besoin de confiance.
On ne peut que se réjouir de l’engouement des marques à faire évoluer leurs produits. Mais nous devons nous assurer que ces évolutions sont légitimes, et réellement positives. Les mini-scandales, articles démontant telle ou telle initiative ou marque, nourrissent la défiance des consommateurs. Communiquer sur l’engagement d’une marque permet de lui donner une préférence : il est vital de le reposer sur des preuves et de la transparence. C’est à cette seule condition que l’on pourra créer un mouvement de masse plus vertueux chez les consommateurs. Quelques labels, comme le bio, ont réussi à émerger malgré des égratignures… Mais sinon c’est le plus grand flou.
Cohérence. Pertinence. Transparence.
Il est absolument nécessaire de se poser les bonnes questions, bien en amont. À quoi bon utiliser toujours plus de sacs poubelles jetables, même en plastique recyclé, si on ne réfléchit pas à optimiser l’expérience de tri du consommateur ? En quoi un produit « made in France » (la loi dit « au minimum assemblé en France ») est-il plus responsable qu’un produit sourcé dans des pays en développement dans de bonnes conditions, qui permettent aux populations locales d’avoir des revenus et de faire perdurer leurs traditions ? Que signifie « naturel » ? Tant de filières peuvent être considérées comme naturelles alors même que leur culture utilise des pesticides et des engrais. Réduire ses packaging est certes une bonne idée, déjà d’un point de vue économique… mais ne suffit pas à affirmer qu’une marque est responsable : n’y a-t-il pas autre chose à creuser dans son produit avant de se gausser d’un emballage allégé ? A-t-on pensé en même temps, à la composition du produit, à l’économie de son usage, à son gaspillage ? Il est important de considérer le produit dans son ensemble. Ne pas s’attaquer aux enjeux majeurs sera tôt ou tard une lacune qui pénalisera la marque…
Que faire ?
Aujourd’hui nous savons tous qu’il faut agir. Les marques que nous accompagnons sont très souvent animées d’une vraie volonté d’évoluer. Mais, pour beaucoup, la tâche est ardue : par manque de culture, d’expertises, de vision globale… C’est pourquoi il est important de réfléchir avec eux sur l’ensemble du cycle de vie du produit : même peu poussée, cette analyse identifiera les impacts principaux, les enjeux sociaux et sociétaux de la consommation, les problèmes de fin de vie et les solutions pour y répondre.
C’est une fois ce travail fait (et pas avant) que la communication pourra prendre le relais : expliquer, vulgariser les points précis où l’on aura agi, et raconter de façon globale la démarche, quitte à expliquer ce qui n’a pas pu être fait, ce qui est en cours. La transparence, c’est un des principaux leviers de confiance. C’est ainsi que nous pourrons fidéliser les consommateurs aux marques « engagées ». L’engagement est une valeur universelle, belle et forte. Il ne s’agit pas, aujourd’hui moins que jamais, de la galvauder pour gagner momentanément quelques parts de marché.
Le diable s'habille en Vinted
INfluencia • Le 03.02.2021
J’ouvre les yeux, et je m’aperçois devant mon miroir flambant vieux (80’s, chiné à la Braderie de Lille), qu’ils sont devenus 2 billes de naphtaline qui me chuchotent à l’oreille que c’était mieux avant. Avant me dit à son tour que ce ne sera pas mieux demain, et Demain, lui, se tait (il en a assez qu’on décide à sa place de son avenir).
Silence. Un ange passe.
Il est habillé en Gucci, sneaker Nike Dunk et sac Hobo Prada d’occase (les must-have de la seconde main 2020 selon Vestiaire Collective) : ça m’inspire. Je plonge dans mon vestiaire à moi où ça se bouscule pas mal. Les pieds-de-poules se prennent le bec, le tartan me fait de l’œil, le Prince de Galle me fait du pied-de-poule… Comme chaque matin ça tourne en rond. Ce sera T-shirt blanc H&M et Jean Uniqlo. Comme d’hab.
TROP.
Parce qu’en fait je ne tourne (en rond) qu’avec 15 tenues, alors que mon dressing m’en propose inlassablement 40 chaque matin. L’ange repasse en me criant en effet que « 70% de ta garde-robe n’est pas portée » (il l’a lu sur le Huffington Post) et disparait en enfonçant une porte ouverte : on accumule tant et tant de fringues qu’on ne sait plus quoi en faire.
VINTED.
Cette plate-forme, inventée par les lituaniens Milda Mitkute et Justas Janauskas en 2008, part justement de ce constat : ce volume impensable de fringues qu’ils ne portaient plus (des T-Shirt qu’ils ne se souvenaient même pas avoir achetés). Ils ont décidé de créer un système d’échange entre copains / voisins. Malin. Le monde étant ce qu’il est (petit), nous sommes aujourd’hui 21 millions de voisins, dont 8 millions de Français, à utiliser Vinted dans 11 pays européens, plus les États-Unis. Pour 1,3 millards d’euros de CA prévu en 2019. Mirobolant.
MIAM.
Un succès si appétissant que tout le monde y va de sa plate-forme seconde main : Camaïeux, Cyrillus, Darty, Weston, Kiabi, Cdiscount, La Redoute (avec La Reboucle), OKAIDI & son troc, Petit Bateau, Décathlon… On ne compte plus les initiatives d’occase. Une manne juteuse qui redore l’image des marques en la verdissant. On estime qu’en 2028, le marché de la seconde main dépassera, en volume celui de la fast fashion (source). Et sur les 40% de Français qui auraient déjà acheté des vêtements d’occasion en 2019, la moitié a eu recours à Vinted. (source france info de Institut Français de la mode x FEVAD). Est-ce une bonne nouvelle ?
VERTUEUX.
La seconde main, ça fait partie du passé ET de l’avenir : notre présent est tout simplement en train de s’en souvenir. On ne produit pas de nouvelle matière, on réduit les émissions CO2 et pollutions en tout genre (air, eau… souvenons-nous que l’industrie textile est la 2e plus polluante), on allège notre poids sur l’utilisation des ressources naturelles (fabriquer un tee-shirt nécessite l’équivalent de 70 douches et un jean, 285), on transforme un déchet en ressource tout en générant de la richesse économique. Bref : c’est super.
MAIS VICIEUX.
Ça fait tellement de bien qu’on a tendance à redoubler d’efforts. Comme « en plus, ça fait du bien à la planète », on reproduit voire intensifie notre boulimie d’achat #déculpabilisation. Ces baskets Common Project à seulement 60€ : « j’en ai 4 paires, mais pas tout à fait les mêmes ». J’achète.
Est-ce la circularité ou l’achat à pas cher qui motive les utilisateurs Vinted ? Son caractère vertueux, qui peut devenir une bonne excuse à acheter, n’aurait-il pas desservi son but : une consommation plus raisonnée ? Est-ce que son modèle n’aurait pas été dévoyé par nos mauvaises habitudes : « de toute manière, je le revendrai sur Vinted » ? L’arrivée de Thomas Platenga aux commandes de la fripe en ligne, en 2016, avec ses méthodes d’incitation reprises des sites e-commerces, aurait-elle rendu Vinted un épouvantail à € et à bonne conscience ?
En outre, Vinted ne géolocalise pas l’achat : les articles arrivent donc de parfois très loin, générant beaucoup de transports.
Enfin, cette économie de la seconde main fait main basse sur des articles autrefois donnés aux associations comme Emmaüs.
PAREIL.
Avec Vinted, ou autre, on fait finalement pareil. Nos dressing débordent tout autant d’occase que de fast fashion (qui sont parfois les deux). Tant que l’industrie continuera à sur-produire, à nous biaiser pour que l’on achète toujours plus (comme ASOS par exemple qui permet de ne payer qu’au moment de la réception de la marchandise), tant que nous, consommateurs, ne modifierons pas notre comportement naturel d’accumuler (acheter, comme les études le disent : ça rassure, ça procure du plaisir, ça rend heureux, et ça apaise nos tensions) il est normal que le marché de la seconde main croisse autant. Quand on achète trop, on revend beaucoup.
Le fait que la seconde main surpasse la première main en 2028 est une bonne nouvelle, mais à condition que le neuf diminue ses volumes… ce qui n’est pas tout à fait prévu.
LE DIABLE.
Des voix critiquant le bien-fondé de Vinted ont fleuri sur internet. C’est vrai : certaines pratiques sont largement discutables, de la part de la marque comme des utilisateurs : ces « conso-marchandes » comme les appelle Élodie Juge, ingénieure recherche pour la chaire Trend(s) qui analyse depuis 2013 le comportement des pratiquantes les plus assidues de Vinted qui l’utilisent comme une source de revenu, et non comme une ressource plus vertueuse.
Mais nous, chez Hyssop, serions plus nuancés. Le diable que nous évoquons n’est pas Vinted : ce sont nos habitudes, nos pulsions, notre culture de la possession. Vinted n’est pas innocent, mais nous ne sommes pas non plus à sa merci. On peut toujours décider.
LE BON SENS.
Renouons avec un peu plus de bon sens. Nous, consommateurs, comme Vinted, qui pourrait revoir un tantinet son business model pour retrouver la raison pour laquelle il est né : faire du vide dans son dressing, tout en préservant la planète. Refuser de croître : est-ce si insensé ? Tout comme Craigslist, le LeBonCoin américain qui a refusé de se moderniser, de se pervertir. Tout dépend quelle logique on adopte. Je vais personnellement terminer cet article en allant donner à Emmaüs Défi ces baskets Common Project achetées à seulement 60€.
Design d'Utilité Publique
Influencia • Le 12 mai 2020
Il y a quelques semaines, au petit-déjeuner, ma fille m’a demandé de lui “tartiner du beurre sur son pandémie”. Humm… Ce COVID n’obsède décidément pas que les grands. Scientifiques, économistes, gros groupes, petites start-up, Pierre Paul & Jacques : tous sont d’accord. Il est urgent de réorienter et repenser nos modèles, notre société, nos façons de vivre et de produire ensemble. Tous rejoignent (enfin) ce que le Club de Rome préconisait il y a 50 ans : une transformation radicale de notre société face aux limites de la croissance (1972, Rapport Meadows). Le Développement Durable entre en scène. Quelques entreprises s’en sont emparé et voient d’ailleurs aujourd’hui les fruits de leur engagement. Mais beaucoup n’y sont allées qu’à la marge. Aujourd’hui, nombreuses sont celles convaincues de la nécessité de réfléchir à leur RSE, poussées par leurs parties prenantes (consommateurs, fournisseurs, salariés…) mais aussi par une urgence devenue aussi palpable que virale.
Ce COVID est un révélateur.
Le bon dans tout ça, c’est qu’il a stoppé net notre course à on ne sait plus trop quoi. Le monde entier s’est arrêté et a écouté Demain tousser, nous dire comment il allait (mal), et que ce COVID n’est pas la vraie maladie mais simplement un petit symptôme, épiphénomène du chaos qui nous attend. Ce chaos qu’on percevait comme un futur pas si grave, pas si proche, est en train de débarquer, comme le plus angoissant des épisodes de Black Mirror.
Le temps est à l’action : vive la “RSE augmentée”
Agir, cela passe bien sûr (car oui : on en est sûrs) par la RSE, le green, le responsable, l’innovation durable… Peu importe son nom, c’est à base de bon sens. Face à l’urgence (pour rappel, on n’a que 10 ans pour agir, selon l’AFD), des connexions, des mix d’intelligences hétérogènes, des collaborations doivent se mettre en place. Dire “On est plus forts à plusieurs” serait enfoncer une porte ouverte, mais tant pis : on l’enfonce parce qu’elle est ouverte sur de belles solutions pour l’avenir.
Parmi les forces à actionner, le Design porte son lot de belles promesses.
Le designer, ce créatif au service de la fonction, est un écoutant hors pair, un ciment du travail collaboratif. On le retrouve partout : designer industriel, UX, mobilier, graphique, textile, de services, d’espaces publics… Partout, sauf en RSE. Le plugger à nos problématiques durables, entouré d’expertises pertinentes, est une clef de mise en action, capable de décadrer les problèmes, de nouer les intelligences en intelligence collective, de passer à l’action rapidement sous forme test&learn avec un focus sur l’analyse du besoin réel user centric…. Cette nouvelle alchimie est ce qu’on pourrait appeler une “RSE augmentée” : on décadre et on pense à plusieurs, et surtout on agit vite (place au Design Doing !), on accélère, avec et pour les entreprises.
Les entreprise : ce sont elles les locomotives.
Aujourd’hui affaiblies, un brin désemparées, elles sont obligées de repenser leur modèle. C’est justement le moment de remettre leur pendule à l’heure (qui est grave) : réfléchir leur raison d’être, en fixer un cap et l’incarner grâce à des actions concrètes, faire évoluer leurs produits, leurs services, leur communication, leurs engagements, pour aller dans le sens de leur responsabilité sociale et environnementale, et celui de l’Histoire en général.
“J’ai l’audace de penser que, aux côtés des chercheurs, des scientifiques, des ingénieurs, des sociologues ou des entrepreneurs, les designers sont déterminants pour penser et rendre intelligibles, utiles et agréables, ces alternatives qu’il ne faut plus, à présent, tarder de proposer” confiait le designer Ramy Fischler au journal le Monde.
La crise sanitaire a été un coup de fouet
Elle a généré de belles actions initiées par des designers qui ont su réagir vite, bien, et à propos. Cette poignée toulousaine que l’on ouvre avec le coude; ces réflexions du designer visionnaire Patrick Jouin sur Concilier distance et réouverture des restaurants menées avec Alain Ducasse; ces CURA Pods, containers transformés en capsules de soins intensifs par un groupe de travail international (architectes, ingénieurs, médecins, militaires); cet appareil d’aide respiratoire (OxyGEN) fabriqué en Espagne avec un moteur d’essuie glace et produit vitesse grand V avec Seat; le masque EasyBreath de Decathlon, pimpé pour s’adapter au Covid par un médecin et une entreprise spécialisée en impression numérique… sont autant de vibrantes (et vivantes) preuves de la créativité associée à l’intelligence collective. Trois journalistes ont d’ailleurs répertorié de telles initiatives sous le #DesignResistenza.
Le brief était le COVID. Imaginez maintenant tous les autres briefs.
Ceux que l’urgence climatique & sociale nous souffle (dans les bronches) et comment la RSE augmentée (designers et expertises ciblées) pourrait les nourrir, les twister, les emmener plus loin. Accompagner la mutation des modes de travail (plasticité entre vie professionnelle et privée, besoin de reconnaissance et de sens des salariés, écarts de génération millenials VS les autres, fidélisation des talents…). Transformer les centres commerciaux en centres de lien, plus ouverts et fluides (surtout en ces temps de pandémie). Renouer avec la nature, quand plus de 2/3 de l’humanité vivra en ville en 2050; et comment la repenser comme un vrai lieu de vivre ensemble. Moins peser sur nos ressources non renouvelables; et comment mieux revaloriser les autres ? Améliorer le circuit (agro)alimentaire, la proximité consommateur/producteur, le mieux manger ? C’est quoi d’ailleurs mieux manger ? Repenser des lieux où les seniors passent leurs dernières années mieux entourés…
Designers : les briefs sont infinis, vos solutions le sont tout autant !
Passons de la promesse à l’action. En mettant nos lunettes RSE Augmentée, nous aimons réinterpréter ces promesses de grandes marques sous l’œil de la satisfaction RSE et non plus uniquement client. Faire du ciel le plus bel endroit de la terre, ce fameux 2e effet KissCool, Parce que nous le valons bien, energisons la vie tous les jours, Just do it… Ben oui, justement : let’s just do it. Designers, c’est le moment ! L’appel est lancé.
Le Baromètre RSE #4 • La relance verte
Cette semaine, c’est : ENFIN ! À quelques rétrogrades ou climatosceptiques près qui continuent à faire l’autruche, la conviction d’une relance verte comme seule issue viable pour l’avenir & pour la planète se porte partout en tribunes éclairées, collectifs d’entreprises, rapports citoyens, jusqu’aux portes de l’Élysée. La reprise (et l’avenir) seront verts : les peuples l’exigent, les économistes (entre autres) le recommandent, les financiers s’y attèlent. Est-ce l’heure du grand réveil ? Le petit résumé vidéo pour les plus pressés.
Rappel. Le COVID : c’est nous.
L’origine de la pandémie serait la conséquence directe du trafic illégal de faune sauvage en Chine (pangolin & viande de brousse notamment). Le tout propagé par la mondialisation et les transports (un virus ne se transporte pas : c’est nous qui le faisons). Mais également accéléré par la déforestation, l’exploitation des sols et des animaux. Ajoutez le réchauffement climatique (d’origine humaine) qui pourrait libérer des virus certains inconnus, congelés dans le permafrost. Glaçant.
Rappel. Ce chaos : c’est nous.
On ne démontre plus la responsabilité de l’homme sur le dérèglement climatique et les catastrophes planétaires. Reste à savoir : pourquoi on ne change pas ? Selon le philosophe Clive Hamilton “Nous sommes tous climatosceptiques” car l’écologie porte des messages que nous refusons : frugalité (qui s’oppose à tort au progrès auquel nous avons tous été biberonnés) et violences à venir (les nier, ça aide à mieux les vivre). D’un point de vue plus économique, l’écologie s’insère mal dans nos modèles économiques car elle lutte avec d’autres enjeux, notamment économiques. En outre, elle demande une concertation internationale difficile à mettre en place dans un contexte libéral & concurrentiel (ce long & passionnant article de YouMatter vous explique tout en détail).
On sait que l’on doit agir. Voilà pourquoi…
On reste perplexes (euphémisme)
Devant la lettre du MEDEF et de l’AFEP (qui regroupe les 113 premiers groupes actifs en France) demandant au gouvernement de différer certaines normes (réduction des émissions CO2 ou d’économie circulaire notamment).
Mais aussi devant le lobbie de l’aviation qui réclame des plans de sauvetage, dénoncés par un #SavePeopleNotPlanes. Ce collectif de 250 associations demandant l’intégration de “conditions sociales et environnementales, avec une protection adéquate des travailleurs et une transition planifiée vers une mobilité juste et favorable pour le climat ».)
Ou encore devant l’épandage & la diminution des limites de sécurité entre habitations et champs traités par épandage, source de particules fines aggravant aussi la mortalité du COVID. Les maires anti-pesticides ainsi que 9 associations ont déposé un recours.
La relance est ouVERTE.
L’économie de l’après COVID sera Green. On le demandait : maintenant on l’exige.
Nous sommes demain, ce collectif de 400 000 entreprise (récemment rejoint par le CJD) demande au gouvernement de conditionner les 20 Mds d’€ d’aide aux grandes entreprises à des engagements écologiques et sociaux concrets et l’appellent à soutenir les entreprises qui le font déjà.
Le Green New Deal, mouvement américain prônant une économie verte, soutenu par l’ONU, repris partout en Europe et dont Ursula von der Leyen a lancé la version européenne fin 2019. Jeremy Rifkin, prospectiviste, le défend fermement et prévoit l’avènement de la 3e révolution industrielle (technologique ET verte).
90 grands patrons réunis par Jean-Laurent Bonnafé (DG de BNP Paribas) appellent à “une mobilisation collective pour faire de la relance économique un accélérateur de la transition écologique.” Notons que le MEDEF et l’AFEP sont également signataires, malgré leur lettre demandant l’inverse au gouvernement (le Président de l’AFEP qui “prend le chômage partiel et garde ses dividendes” n’est pas à une incohérence près).
Aux rapports.
On citera aussi 2 rapports proposant des actions concrètes en vue d’une relance verte.
Celui du Haut Conseil pour le Climat (Climat, Santé : mieux prévenir, mieux guérir) avec 18 recommandations de fonds (décarboner, innover, investir…).
Et celui de la Convention citoyenne pour le climat, créée suite au mouvement des Gilets Jaunes. 150 citoyens tirés au sort ont été mandatés pour définir un modèle de société plus juste pour les hommes et la planète. Objectif : -40% d’émission CO2 en 2030 par rapport à 1990. La crise du Covid les a mobilisés en urgence. 50 premières mesures ont été transmises au Président pour une sortie de crise « qui prépare à un modèle économique et sociétal différent, plus humain et plus résilient ».
BREF.
Le COVID a été un révélateur : que nous sommes de petites choses, que nous faisons partie de la nature que l’on pille, que non, ça ne tourne plus rond.
“Il faut accepter des évolutions radicales pour s’y préparer. Un vrai élan générationnel existe sur lequel s’appuyer pour recommencer autrement. (…) Il faut dessiner un futur enviable pour tous.” confiait le designer belge Ramy Fischler.
On a bien l’impression que c’est ce qui est en train de se passer. En tout, c’est ce que l’on entend : reste les actes. Nous : on s’y met, en tout cas.
Bonne fin de journée, de semaine, et surtout de confinement à tous…